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15/06/2019

Pride Month Music: les Caraïbes.

Aujourd'hui, nous prenons la direction des Caraïbes. Au programme, escales à Cuba, Puerto Rico, la Jamaïque puis la Guadeloupe et la Martinique. Rendez-vous mercredi afin de poursuivre notre voyage musical en Amérique du Nord.

 

Jour 5: Cuba + Puerto Rico + Jamaïque + Guadeloupe/ Martinique.

 

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Krudas Cubensi est un duo de hip-hop afro-cubain queer féministe composé d’Odaymara Cuesta etKrudas Cubensi.jpg Olivia Prendes. En 1996, iels font leur entrée sur la scène hip-hop cubaine puis, en 1998 fondent avec d’autres artistes la troupe de théâtre de rue Tropazancos Cubensi à laquelle se joint Odalys, la sœur d’Odaymara. Après leur passage au festival annuel de rap d’Alamar (quartier de La Havane), Odaymara, Odalys et Olivia forment Krudas Cubensi en 1999. Combler le manque de femmes sur le devant de la scène hip-hop nationale tout en inscrivant leur musique dans un discours féministe motive la création du trio. Lorsqu’iels se produisent au festival de hip-hop de La Havane (2000), leurs travaux artistiques précédents leur valent déjà une petite notoriété auprès de rappeurs et producteurs connus dans le milieu underground. En 2005, iels participent à la création du collectif de rap féminin Omega Kilay toujours guidé.e.s par l’objectif d’offrir une visibilité aux femmes sur la scène havanaise.

Cubensi Hip Hop, leur premier album, sort en 2003 puis en 2005, leur second opus, Kandela. La popularité du groupe se faisant grandissante, iels reçoivent plusieurs invitations pour se produire à des festivals internationaux mais, le gouvernement cubain refuse leurs autorisations de voyage. Par conséquent, iels décident d’immigrer en 2006 aux Etats-Unis pour partager leur art avec des activistes du monde entier, se battre pour la justice sociale internationalement et sensibiliser les gens quant à l’isolation des lesbiennes afro-latines et caribéennes. L’année suivante, iels sortent Resistiendo puis, suivent quatre autres disques : Krudas Compilación (2009), Levántate (2012), Poderosxs (2014) et Highly Addictive (2016).

Krudas Cubensi conjuguent activisme, musique et performance scénique. Leurs paroles dénoncent une variété de problèmes sociaux (tels que le racisme, le sexisme, le patriarcat, le machisme, l’homophobie, la lesbophobie, le classisme et l’agisme) et sont ancrées dans un discours féministe afro-latinx. D’ailleurs, le duo qualifie sa musique de « consciente ». Le but premier de celle-ci est de rendre visible les expériences des personnes queers, racisées, des femmes et des migrant.e.s.

La musique engagée de Krudas Cubensi oscillant entre hip-hop et slam m’a rappelée celle du collectif afro-américain The Last Poets, de Gil Scott-Heron ou encore Saul Williams.

Aujourd’hui iels vivent à Austin au Texas et se produisent à travers le monde sans Odalys qui a quitté le groupe en 2010.

 


 

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Kevin Fret.jpgKevin Fret était le premier artiste de latin trap ouvertement gay. Né à Puerto Rico, le jeune homme fait son coming-out à l’âge de dix-huit ans. Ses parents au départ intolérants finissent par accepter sa sexualité et le soutiennent dans sa carrière. Il peut compter aussi sur le soutient de sa sœur Doryann.

Kevin Fret participe aux compétitions de chant La Banda et Solo Tu Voz avant que sa carrière ne démarre en 2018. La même année, il sort en Avril le clip de son premier single Soy Asi. Le chanteur ne fait pas dans la demi-mesure. Il y arbore un look androgyne entouré de jeunes femmes et armée d’une mitraillette, chantant fièrement sa différence. « Vous avez beau me haïr mais je suis ainsi », « je m’habille » différemment, « je me maquille » et « ça vous déconcerte » lance-t-il à ses haters. Le jeune artiste tenait souvent tête à ces derniers sur les réseaux sociaux afin de dénoncer le harcèlement.

Il sort également en 2018 le morceau Me Compre Un Full Kevin Fret Remix ainsi que Diferente, un duo avec Mike Duran.

Le 10 janvier 2019 alors qu’il circulait à bord de sa moto, Kevin Fret est abattu de plusieurs balles par un tireur non-identifié. Cette mort soudaine fait encore couler de l’encre à Puerto Rico.

Kevin Fret était un chanteur en plein essor. Connu pour ses tenues vestimentaires extravagantes, il voulait pousser les artistes émergents à croire en leurs rêves.


 

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Les mélodies de Diana King mêlant reggae, reggae fusion et dancehall font partie de la bande son de monDiana King.jpg enfance. J’associerais toujours Shy Guy à Bad Boys et, je me souviens encore des paroles de L-L-Lies trouvées dans un Star Club que je chantais en yaourt. Contrairement à d’autres artistes de mon enfance desquels j’ai écouté toute la discographie des années plus tard, je n’ai pas fait cette démarche avec la jamaïcaine. Sa musique n’était probablement pas assez dépaysante pour l’antillaise que je suis, ayant été bercée par le ragamuffin, la soca et d’autres genres musicaux caraïbéens. L’écriture de cet article a été l’occasion de rattraper mon retard.

Après avoir subi un viol en réunion à l’âge de treize ans, Diana King s’enfuit du domicile familial et trouve refuge dans la musique. A Kingston, elle chante du gospel dans les églises et se produit dans des clubs de chant privés. En 1994, elle fait les chœurs sur le titre Respect de Notorious B.I.G. Cette collaboration lui permet de décrocher un contrat chez Sony Musique, maison de disque avec laquelle elle enregistre une reprise de Stir It Up pour la bande originale de Rasta Rockett. L’année suivante, l’artiste sort Tougher Than Love, son premier album. Shy Guy, le premier single devient un tube qui se vend à cinq millions d’exemplaires dans le monde et rejoint l’OST de Bad Boys. En 1997, sa reprise de I Say a Little Prayer est incluse dans la BO du Mariage de ma meilleure amie et rencontre un succès dans les charts américains.  La même année, elle sort son deuxième opus Think Like a Girl qui se place premier dans la catégorie reggae du classement Billboard. Les singles L-L-Lies, Find My Way Back et Supa-Lova-Bwoy font un tabac. Cinq ans s’écoulent avant la sortie de Respect, son troisième disque. L’artiste reste cependant active entre temps. Elle collabore avec des artistes tels que Buju Banton, Shaggy ou encore Ziggy Marley ainsi que Céline Dion. En 2010, elle sort au Japon, Warrior Gurl, son quatrième opus produit par sa propre maison de disque ThinkLikeAgirL Music, Inc. Une sortie internationale de l’album rebaptisé pour l’occasion AgirLnaMeKING a lieu en 2012.

En 2012, Diana King devient la première artiste jamaïcaine à faire son coming-out publiquement. La chanteuse déclare sur Facebook ne plus vouloir « détourner les questions ni le sujet », deux réactions personnelles qui, selon elle, pouvaient traduire une certaine honte voire intolérance de sa part concernant l’homosexualité. Un Vanguard Award lui est décerné en Décembre 2012 aux Out Music Awards pour saluer son acte courageux dans une société jamaïcaine LGBTQ+-phobe. En 2015, le chanteur Shaggy affirmait dans un interview que les crimes homophobes n’existaient pas en Jamaïque mais, seuls les crimes passionnels entre gays. Suite à cela, Diana King a révélé son viol puis rappelé que la communauté LGBTQ+ était meurtrie et leurs droits inexistants.

Tougher Than Love, Think Like A Girl et Respect offrent une efficace fusion entre reggae, dancehall, rnb et pop des années 90. Leurs mélodies m’ont rendue nostalgique du rnb old school et, j’ai parfois eu l’impression d’écouter un disque de Janet Jackson. AgirLnaMeKING reprend ce même combo en y ajoutant une touche électro. La balade zouk Boobai sort du lot mais, c’est l’un de mes titres préférés. Le remix de Yu Dun Kno allie la dancehall à une touche musicale bollywoodienne et, ce morceau est une bombe. L’amour illimité, son duo avec Princess Erika est sorti en mai dernier. Les deux artistes y chantent l’amour universel et la tolérance.

En 2018, Diana King a annoncé qu’elle avait épousé sa compagne la violoniste jamaïcaine Mijanne Webster.


 

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Lycinaïs Jean.jpgC’est en réinterprétant des chansons de ses artistes préférés que Lycinaïs Jean se fait remarquer par le grand public et des artistes connus. Ses vidéos font le buzz sur Youtube et les réseaux sociaux pourtant, à l’époque, la musique n’est qu’un passe-temps amateur pour la jeune femme d’origine guadeloupéenne et martiniquaise.

Née dans une famille de musiciens, elle apprend à jouer de la guitare, du piano et de la batterie. Adolescente, elle se produit dans des cafés concerts et des banquets en tant que guitariste de Swing 7, le groupe de son parrain. Pendant les vacances scolaires, elle accompagne sur scène le groupe Soft pour quelques concerts à Paris et sur les podiums de fêtes communales en Guadeloupe.

En 2014, la jeune autodidacte sort Aimer, son premier single qui remporte un succès sur les ondes antillaises. L’année suivante, elle créée de nouveau le buzz avec le clip vidéo de Mwen enmé-w (Je t’aime). Dans ce dernier, l’artiste se met en scène en couple avec une femme et, fait ainsi son coming-out. Bien que dissuadée de ne pas être aussi « cash » et de céder la place à un couple hétérosexuel dans sa vidéo, Lycinaïs Jean explique : “On m’avait dit que ça casserait mon image, mais au contraire, je n’avais justement encore aucune image, puisque je débutais… Je ne voyais pas pourquoi j’allais m’afficher avec un mec”. Le clip de de Mwen enmé-w bouscule l’un des codes du zouk mettant toujours en avant l’amour hétérosexuel et en plus, l’artiste chante en créole. Une première qui ne plaira pas à tout le monde mais, généra des millions de vues sur Youtube et beaucoup de retours positifs.

En 2016, l’artiste sort son album Lycinaïs Jean où elle chante en français et créole. Mariage de zouk RnB et ballades, ce dernier offre un juste équilibre entre mélodies douces et entraînantes. Le temps de dix morceaux, la jeune femme y promène sa voix emplie d’émotions. Plusieurs chansons m’ont plu. L’antillaise que je suis a été embarquée par les titres zouk comme Si tu veux, Entre nous et Mwen enmé-w. Trop classique à mon goût, Aimer et ses accents folk/ compas reste toutefois un titre efficace. Les percussions et la guitare sèche font de Parfait Tourment une belle balade acoustique. Avant tout mêle la pop/rock avec une touche de reggae. L’arc-en-ciel est une chanson reggae dont le titre annonce la couleur et, Je suis condamnée est une autre balade que j’aime.

Le clip de Mwen enmé-w m’a beaucoup émue à sa sortie. Lycinaïs Jean est l’artiste qui me manquait lorsqu’au lycée je me posais des questions. Voir une personnalité antillaise assumer fièrement sa sexualité et l’affirmer à travers sa musique, m’aurait certainement aidé à m’accepter. J’ai grandi dans un environnement LGBTQphobe où les quelques représentations non hétérosexuelles auxquelles j’avais accès se réduisaient à des clichés ou au gay/ lesbienne de service dans telle ou telle série.

Je suis contente que Lycinaïs Jean qu’offre une visibilité à la communauté lesbienne antillaise et surtout, qu’elle nous délivre un message d'amour universel. Mayday, son nouveau single aux paroles très chaudes est sorti le 6 juin. Un clip vidéo tout aussi bouillant est venu l'illustrer le 14 juin. 


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