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15/01/2014

Pilot : True Detectives ou la fin du buddy cop show ?

Avec Matthew McConaughey et Woody Harrelson pour têtes d’affiche, True Detectives, la série policière d’anthologie d’HBO ne pouvait qu’attirer mon attention. Le label de la chaîne à péage, gage de qualité, et les trailers intrigants mis en ligne ont ajouté à ma hâte de découvrir cette nouvelle fiction. Alors, je vous le dis dès maintenant, mes attentes ont été comblées par ce pilot savoureux de A à Z.

 

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Le témoignage face caméra de Rust Cohle et de Martin Hart, deux anciens co-équipiers au sein d’une brigade criminelle en Louisiane, donne le point de départ à notre histoire. Les deux hommes ouvrent à nouveau le dossier d’une affaire veille de dix-sept ans pour les policiers qui les interrogent. En 1995, une jeune femme non-identifiée est retrouvée sans vie dans un champ. Son corps est dénudé et ses mains sont ligotées. Elle a subi des tortues. Cohle, fraîchement débarqué dans la brigade locale et Hart mènent à cette occasion leur première grand enquête ensemble. Le duo qui se met en quête de l’identification de la victime, puis d’un potentiel suspect ne s’apprécie guère. Cohle, secret et pessimiste de nature est cartésien. Il a une philosophie sur la vie et l’humanité qui lui est toute particulière. Ses opinions font plusieurs fois grincer des dents son partenaire qui le décrit comme un personnage mystérieux enclin à dire des inepties. Hart, est un époux et un père de famille pris par son travail. Cohle, alcoolique pas totalement repenti porte encore le deuil de sa fille qui a eu raison de son mariage. Cette partie du passé de Cohle est évoquée au détour d’une conversation qui permet de mieux cerner l’inspecteur. A bien y regarder, cet homme est un loup solitaire, un aspect de sa personnalité auquel la bière « Lone Star » qu’il boit fait un clin d’œil.

L’enquête des deux inspecteurs est très sombre. Le ton de la série est donné dès le générique. Ce dernière mis en musique avec une bande son de country alternative est visuellement beau. On reconnaît là le souci d’esthétisme des productions HBO toujours présent à une époque où les intros sont à la mode. La réalisation renforce la noirceur de l’intrigue. Celle-ci est accentuée par le faible éclairage choisi dans certaines scènes, et la violence des plans faits sur la victime. La sensation de confinement elle est aussi dominante. La caméra de Cary Joji Funkunaqa nous enferme dans les locaux de la police, dans une voiture de fonction, chez Hart ou encore dans un bar, le soir. Certains décors sont dépouillés comme l’appartement de Cohle, le parking de la morgue est sans vie et désolant, tout cela à l’image de cette ville qui semble être située au fin fond de la Louisiane. Les retours dans le présent permettent de fuir un temps cette atmosphère pesante. La narration de l’épisode par Cohle et Hart face à la caméra des inspecteurs afro-américains a, d’une part, un côté « confessions intimes » et parfois (auto) analyse. D’autre part, elle apporte davantage d’intérêt à l’histoire initiale qu’elle complexifie. 

Le pilot de True Detectives est un épisode lugubre qui n’a nul besoin d’hémoglobine à la The Following ou la Hannibal pour nous glacer le sang. Il fait partie de ces épisodes difficiles à digérer et après lesquels je n’arrive pas à regarder une autre série. J’éviterai donc les visionnages en soirée. Par moments, j’ai trouvé que l’épisode tendait vers le thriller, ce qui ne fût pas pour me déplaire. Dimanche dernier, ce season premiere a réuni 2.3 million de téléspectateurs, marquant ainsi le second meilleur démarrage d’une série sur HBO après celui de Broadwalk Empire en 2010. Souhaitons que ces bons scores se maintiennent, il me tarde de découvrir la suite.

Ma réplique favorite :

Martin: You got any sleep last night?

Russ: I don’t sleep, I dream.

 

 

Le générique de True Detectives.


18:20 Publié dans Pilot, séries | Lien permanent | Commentaires (0)

13/01/2014

Torka aldrig tårar utan handskar, Sjukdomen (1x02).

Alors que le premier chapitre de Torka aldrig tårar utan handskar avait valeur d’introduction, ce deuxième volet nous fait entrer dans le vif de l’épidémie du SIDA. Des révélations clés sont faites, nous offrant ainsi un épisode bouleversant de bout en bout. Diffusé en octobre 2012 sur la chaîne suédoise SVT1, « Sjukdomen », le titre de ce chapitre que l’on peut traduire par « maladie » porte bien son nom.

 

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Rasmus et Benjamin vivent une relation amoureuse classique et épanouie, bien que celle-ci soit cachée de leurs familles respectives. Benjamin décide même de s’installer avec son « ami » Rasmus, un garçon mystérieux qui serait plus rassurant aux yeux de ses parents s’il était un Témoin de Jéhovah lui aussi. Malheureusement, les envies de liberté de Rasmus auront raison de cette lune de miel. Alors que son petit ami veut d’une relation exclusive, Rasmus davantage intéressé par une union libre préfère papillonner de droite à gauche. Malgré leur vision discordante sur la vie de couple, l’amour que les deux jeunes hommes se portent l’un à l’autre crève l’écran. Les marques d’affection qu’a Rasmus envers Benjamin en présence de leurs amis sont naturelles et touchantes. Adam Pålsson et Adam Lundgren partagent une complicité belle et sincère.

Les souvenirs heureux d’enfance de Rasmus et Benjamin hantent la narration ponctuée d’allées et retours dans le temps. L’enchaînement des scènes fait parfois penser à un collage où bout à bout ont été alignés, dans le désordre, des épisodes marquants dans la vie des personnages. Bien qu’elle conserve une certaine logique, cette structure narrative non-linéaire m’a au début dérangée, car j’ai eu par moments du mal à me situer dans le temps. Les fins de scènes qui se clôturent souvent avec un climax abrupt ne m’ont pas facilité la tâche elles aussi. Néanmoins, à mesure que j’ai avancé dans le déroulement de l’histoire je suis parvenue à me repérer. Il y a une certaine circularité dans la réalisation et la narration qui fait écho au cycle de la vie imprégné ici de poésie.

En effet, la naissance, la renaissance et la mort sont des figures centrales dans « Sjukdomen ». Les souvenirs de vacances de Rasmus et Benjamin— à la mer pour l’un et dans une maison de campagne pour l’autre— sont là pour nous rappeler l’enfance et l’innocence révolues des deux jeunes hommes. Le coming-out du couple amorce le début d’une seconde vie exempte de mensonges, mais aussi le deuil que font des parents de leur fils et le deuil que celui-ci fait de sa vie familiale. On aura droit aux traditionnels « es-tu sûre » de ton homosexualité ? « Tu peux combattre ce mal qui te ronge » et « il existe un remède à tout ça ». Ces propos ont une résonnance toute particulière en ces années 1980 où les homosexuels étaient vus comme des damnés payant le prix de leurs « péchés » en attrapant le SIDA. Par ailleurs, l’épisode a l’intelligence d’évoquer par touches légères subtilement intégrées cette homophobie et le discours religieux qui y est attaché. Rabâcher ce genre de discours entendu maintes et maintes fois n’aurait fait qu’alourdir l’histoire. La foi de Benjamin n’est pas utilisée en soi comme un prétexte moralisateur, mais on l’explore dans sa complexité, sa contradiction. En outre, ses croyances, bien que raillées par Rasmus, ne sont pas diabolisées. Ce parti pris, du moins dans cet épisode, accentue l’aspect documentaire de la série qui souhaite avant tout immerger le téléspectateur dans un groupe de la communauté gay stockholmoise lors d’une période charnière.

 

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La mort rôde autour de nos héros et dans leur sympathique groupe d’amis qui ne serait pas pareil sans le flamboyant Paul, sosie suédois de Patrick Juvet. Bien que clichée, la scène où tout ce petit monde regarde Dynasty chez Paul apporte une bouffée de légèreté dans cet épisode qui en avait bien besoin. Les montages parallèles de scènes extrêmement poignantes avec d’autres séquences décuplent le drame qui se joue devant nos yeux sans pour autant que le ton soit exagéré. La poésie et la symbolique de certaines de ces séquences apportent charme et sensibilité à cette histoire sombre. L’interprétation des acteurs est juste de vérité, et on ne peut être qu’en empathie avec ces personnes sur qui le ciel s’effondre. Les dix dernières minutes de l’épisode centrées sur Bengt, un ami acteur de la bande, ajoutent à la difficulté de ce chapitre qui aura été allégorique jusqu’au dernier plan.

Ma réplique favorite: "Dynstay is not TV, it's a religious experience" (Paul).

 

04/01/2014

Friday Night Lights: pilot.

 

Si on m’avait dit un jour que je retiendrais mes larmes devant un match de football américain, j’aurais rigolé. Cette perspective était jusqu’à hier soir aussi improbable que l’idée d’accepter Hank Rizzoli (Parenthood) pour le cynique incompris de tous qu’il n’est pas. Le pilot de Friday Night Lights n’a pas fait de moi une aficionada de football américain mais m’a prouvé qu’on pourrait croire encore à la beauté du travail en équipe. Avant d’entrer dans le vif du sujet, je voudrais m’adresser à Kyle Chandler et à Gaius Charles. Tous deux semblent atteints du Syndrome Herrmann—en référence à Christopher Herrmann de Chicago Fire cette affection où le sujet s’exprime comme s’il avait une patate chaude dans la bouche si bien qu’on comprend la moitié de ce qu’il dit. Messieurs, faites un effort. A-R-T-I-C-U-L-E-Z ! Ceci étant dit, passons-donc à mon avis sur ce premier épisode.

 

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Les quarante-cinq minutes de ce pilot m’ont paru longues au début. J’ai eu du mal à entrer dans cet épisode. Les interviews du Coach Taylor et de ses joueurs entrecoupées par des séances d’entraînements, les bribes de conversations qui se succèdent lors du rassemblement d’avant-match s’ils apportent du dynamisme et font écho à la vélocité des footballeurs sur le terrain ont quelque chose de perturbant. La réalisation à la manière d’un documentaire, le grain de certaines images qui rappelle des vidéos amateurs et les commentaires audios de journalistes m’ont toutefois séduit. En effet, ils apportent du réalisme à l’histoire et nous immergent pleinement à Dillon et dans l’univers footballistique. Les plans extérieurs de Dillon filmés en panoramique font du spectateur un nouvel arrivant en ville, cela au même titre que les Taylor, et petit à petit, on se mêle aux habitants lors du rassemblement puis du match. Je n’ai pas eu la sensation d’entrer brutalement dans l’intimité des personnages, mais je me suis sentie accueillie, invitée chez eux. A ce propos, je regrette de ne pas en avoir appris davantage sur les membres de l’équipe et la famille Taylor. Par exemple, j’aurais voulu que la présence à l’écran de Julie ne passe pas par l’illustration du cliché de la fille sage et studieuse voire intello, savoir comment sont nées les tensions entre Tim et Smash. J’ai davantage senti Eric impliqué dans sa profession de Coach que dans son rôle d’époux et de père. Durant la scène où il est dans le salon avec Tami et Julie, il était distant, enfermé dans son monde. J’avais presque le sentiment que les filles lui faisaient chier. Ce déséquilibre entre vie professionnelle et familiale est peut-être un thème que la série va aborder. Quoiqu’il en soit, pour l’instant, je ne trouve pas Eric très proche de sa famille mais je peux me tromper.

Le découpage temporel de l’histoire accentue l’effet documentaire et créé chez le spectateur l’impatience d’être au match du vendredi soir. Un tel découpage n’a rien d’innovateur et j’ai bien l’impression qu’il sera adopté tout au long des cinq saisons. Pourtant, les scénaristes tiennent là l’occasion de s’émanciper pleinement du schéma narratif chronologique traditionnel pour nous offrir des épisodes on l’on joue avec le temps. Les épisodes antéchronologiques, qui usent de flashbacks à bon escient, nous projettent dans un futur ou montrent un huis clos entre les personnages sont mes préférés toutes séries confondues. J’ai en tête le génial « Quand la nuit rencontre le jour » (9x21) d’Urgences où la garde de jour de Carter et la garde de nuit de Pratt sont entrecoupées lors d’une éclipse solaire ; « Conor McNamara, 2026 » (4x11) épisode flashfoward de Nip/Tuck et le seul bon épisode de la série ; « Appel au secours » (4x11), le bottle episode de New York 911 où Bosco et Monroe se retrouvent face à un homme suspicieux qui saigne. Pourvu que les scénaristes aient un tant soit peu au cours de ces soixante-seize épisodes cassé la linéarité de la narration.

Je suis finalement entrée dans cet épisode pendant les scènes d’avant-match et le match du vendredi. J’avais l’impression d’être devant ma télé et d’assister à un vrai match. J’ai ressentie une vraie communion entre les joueurs des Panthers, une solidarité, un esprit d’équipe desquels la mésentente entre Tim et Smash n’a pas eu raison. Le soutient de toute la ville envers ses joueurs, ce pouvoir qu’à le football de réunir et d’unir des personnes qui ne le seraient peut-être pas d’ordinaire ou ne se supportent pas en temps normal, a quelque chose de magique. Les séquences où les joueurs prient dans les vestiaires et celle où les spectateurs se joignent à eux en fin de match étaient belles. Le silence religieux qui envahit le stade après la chute de Jason, l’entrée de Matt sur le terrain, la victoire des Panthers et la prière commune récitée font partis de ces moments forts en émotions durant lesquels j’ai retenu mes larmes. Je reproche néanmoins à Peter Berg le trop plein de dramatisation avec le ralenti d’un Matt marquant le touchdown décisif, ou celui des plans du Coach Taylor à l’hôpital. On a très bien compris que Matt avait une lourde responsabilité en entrant sur le terrain et que ce match était déterminant pour lui, c’était inutile de l’héroïser à outrance. L’alternance entre le déroulement du match et les incursions à l’hôpital, le recueillement des joueurs et du public, la voix-off du Coach, de même que la bande son illustrant le tableau sobre mais efficace de la fin apportaient largement son lot d’émotions. Le plan final d’un Coach Taylor glissant sa main dans celle de Jason conclue superbement cet épisode. Friday Night Lights promeut des valeurs propres au sport mais aussi ancrées dans les fondements de la société américaine. L’ardeur au travail, l’assiduité, le respect et la fraternité sont au cœur de cette série. A une époque qui célèbre l’individualisme et où beaucoup croient qu’on devient forgeron en participant à des émissions de télé-réalité, ça ne fait pas de mal.